2026 ? Non 2024 : Le couperet CSDR va tomber plus vite qu’attendu !

Le 23 octobre 2023, les normes de reporting extra-financier ont été adoptées par le Parlement européen. Les seuils d’application ont été réhaussés, mais l’essentiel a été validé. Comme toujours, la première réglementation est moyennement contraignante, mais nous savons par expérience qu’il y aura une suite, plus volontariste à chaque étape.

Pour ceux qui espéraient y échapper, la bonne nouvelle est donnée par le réhaussement des seuils. Mais la contrepartie est que la CSDR sera applicable dès 2024 !

 

IL EST URGENT DE VOUS PRÉPARER

Certes il faut être prêt pour le reporting, mais celui-ci ayant pour seul but de vous amener, étape par étape à des modèles économiques parcimonieux en consommation de ressources matérielles, il est tout aussi urgent de vous préparer à changer de modèle économique (nous ne disons pas “modèle d’affaires”). Et puisqu’il en existe un qui associe différenciation et réduction des coûts, compétitivité prix et hors prix, qui vous permet d’augmenter vos marges tout en baissant vos prix, pourquoi ne pas le considérer ?

 

La RSE a beaucoup changé

Dans les années 2000, la RSE vantait les mérites d’une politique tenant compte des aspects sociaux et environnementaux. Elle visait surtout à donner un contexte commun à des personnes très différentes dans des groupes mondialisés. C’était le temps des voyages, des découvertes de populations, de cultures différentes, d’ouverture de marchés, d’idées nouvelles, d’appartenance à l’entreprise avant tout.

Aujourd’hui, ce temps nous parait bien loin : le monde s’est fragmenté et continue dans cette voie de manière, semble-t-il, inéluctable. La RSE s’est adaptée pour devenir ce qu’elle était censée être dès sa conception : la vérification de l’équilibre entre économie, social et environnement, et la notion de souveraineté est de retour.

L’ESG a acquis de la maturité

Mais ces trois pôles, justement, ne peuvent connaître l’équilibre que si le quatrième, la gouvernance, joue pleinement son rôle. Or, malgré les incantations, les promesses, la pression financière donnait toujours, dans la pratique, la préférence aux entreprises ou aux options, qui rapportaient le plus !

Dans un monde globalisé où personne ne s’inquiétait d’une éventuelle rupture d’approvisionnement, cela n’avait pas beaucoup d’importance, au moins en apparence, et au moins à court terme. Mais le long terme se venge toujours d’avoir été négligé. Les réglementations ont évolué, elles ont mûri, elles ont appris à ne laisser aucune porte de sortie à ceux qui ne veulent pas jouer le jeu. Etape par étape, elles ont introduit les entreprises dans des procédures qui leur font considérer sérieusement beaucoup plus de paramètres que la rentabilité. La loi AGEC les oblige à déclarer leur consommation de matières premières et à établir un plan de réduction de cette consommation, lequel fait ensuite l’objet d’un bilan. La norme européenne CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) ne sera appliquée qu’en 2026, mais le Haut Conseil du Commissariat aux Compte se mobilise pour être opérationnel dès 2024 dans la vérification des comptes extra-financiers.

ESG = Environnement, Social et Gouvernance. Pourquoi donc l’économie n’apparaît-elle pas ? La réponse est simple : est-il nécessaire de pousser les financiers à être attentifs à la rentabilité ? La réponse est évidemment dans la question. Alors le maître-mot introduit est Gouvernance. Car si les investisseurs ne sont pas censés être des maîtres de modèles économiques, des experts des techniques et des marchés, cela ne les empêche, en rien, de s’assurer que ce que la direction d’une entreprise fait est bien en accord avec l’équilibre requis entre les trois pôles de la RSE.

Cela ne va-t-il pas coûter cher, voire très cher ?

Encore des contraintes qui vont être autant de coûts supplémentaires ? N’est-ce pas toujours comme cela ? Eh bien non !

Non, parce que la réponse est oui quand on reste dans le même modèle, mais si l’on change de modèle économique (nous ne parlons pas de modèle d’affaires), cela peut être non ! On n’a pas inventé la lampe à incandescence en cherchant à perfectionner la bougie. Quand on change de modèle économique, tous les paramètres changent et ce qui était vrai dans l’ancien peut devenir faux dans le nouveau et inversement. Et il se trouve que ce que disait Michael Porter, c’est-à-dire que l’on pouvait dominer par la différenciation ou par les coûts, et qui était vrai dans le cas du modèle qu’il a étudié dans les années 70-80, devient faux dans le cas de l’économie de la fonctionnalité, ou vente de l’usage. En particulier, avec ce modèle, on peut dominer à la fois par la différenciation ET par les coûts !

Longtemps, on a voulu croire, ou voulu faire croire, que l’économie, d’une part, et le social et l’environnement, d’autre part, étaient antinomiques. Ce n’était pas aussi vrai que prétendu, mais il y avait souvent un compromis difficile à mettre en place. Avec l’économie de fonctionnalité, ce n’est plus un compromis, c’est une compatibilité, une synergie.

Imaginez seulement que, avec ce modèle, on puisse augmenter ses marges tout en baissant ses prix ? Vous ne rêvez pas, c’est vrai ! D’où vient de miracle ? Il n’y en a pas, il y a maîtrise de l’ensemble du cycle de vie, ce qui permet des synergies entre ses différentes composantes, il y a aussi synergies avec les composantes de l’écosystème. Cela nécessite sans doute des illustrations : elles sont disponibles[1]. Il y a aussi et avant tout des économies de ressources matérielles car le non-transfert de propriété entraîne la recherche de la plus grande durabilité possible. Or, ceci va dans le sens de la réduction de l’empreinte écologique, de la pollution, de la dépendance aux importations, et comme ce résultat est dû à un personnel auquel on demande de penser, d’avoir des idées, celui-ci est bien payé. Plus il pense efficacement, plus il génère la plus-value qui finance l’augmentation de son revenu.

Quel rapport entre l’économie de fonctionnalité et la RSE ?

Nous venons de le voir : une rentabilité très sensiblement accrue, fondée sur une compétitivité prix et hors prix (une autre façon de dire réduction des coûts et différenciation), pour ce qui est de l’économie, une réduction de l’empreinte écologique avec toutes ses conséquences, pour l’environnement, et un abandon des esclaves du bout du monde pour une main-d’œuvre pleinement partie prenante de l’entreprise, pour ce qui est du social. CQFD !

D’autant qu’il devient de plus en plus difficile de recruter et de conserver les bons éléments si l’image RSE est fausse. La aussi se trouve un élément de la désormais indispensable résilience !

Et surtout : s’organiser pour satisfaire la demande de reporting de la réglementation, c’est très bien, mais c’est encore mieux de changer de modèle pour, effectivement, devenir résilient, se protéger des pénuries de matières premières et des prix bientôt insensés parce que strictement politiques.

A quel degré faut-il s’y intéresser ?

Voilà une question-clé ! La réponse dépend du besoin que l’on souhaite satisfaire. Si un dirigeant craint que le modèle de rupture qu’est l’économie de fonctionnalité rende le personnel craintif, il devra sensibiliser ce personnel pour qu’il comprenne qu’il est, au contraire, une voie de développement et de montée en puissance de chacun. Si son projet est de préparer l’intégration du modèle dans le fonctionnement de l’entreprise, l’option sera de former ce personnel pour qu’il puisse accompagner cette intégration et grandir avec elle. Si ce projet est de pratiquer l’intégration au plus tôt pour prendre un temps d’avance sur la concurrence, ou la rattraper, alors il lui faudra associer formation du personnel[2] et accompagnement dans le projet.

De plus en plus d’entreprises ayant des perspectives de croissance forte, et donc des besoins de financement, se tournent vers les divers moyens d’être pleinement en conformité avec les réglementations actuelles et à venir. D’autres voient leurs chaînes d’approvisionnement mondialisées menacées, les pénuries à venir, la remise en cause du modèle sur lequel elles ont bien vécu pendant plusieurs décennies. Dans les deux cas, immanquablement, elles s’intéressent à l’économie circulaire et à l’économie de fonctionnalité, sa boucle la plus courte, c’est-à-dire la plus rentable, la plus écologique et la plus sociale.

Et vous, comment ressentez-vous cette évolution ? Comment vous y préparez-vous ?

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[1] « L’Economie circulaire pour les Nuls » Eric Fromant, First éditions, 2021.

[2] https://www.sefior.fr/formations-en-ligne/